Alors que chaque jour nous rapproche du Meeting Herculis EBS, nous avons téléphoné à l'une de nos têtes d'affiche Joshua Cheptegei. L'occasion de discuter de son confinement, de comment cela a modifié ses plans, de sa vie et de ses prochaines perspectives.
Matthieu : Où as-tu passé ton confinement ?
Joshua : J’étais à Kapchorwa, au Ouganda.
M : Comment c’était ?
J : À la fois bien et mal. Cela m’a permis de passer plus de temps avec ma famille, mais dans le même temps, le sport nous manque énormément.
M : Comment t’es-tu entrainé ?
J : Nous n’avons pas eu beaucoup de cas (pendant la pandémie) au Ouganda. Il y a un peu plus d’un mois, le gouvernement a assoupli le confinement. Dans un premier temps, nous avions un entrainement individuel mais désormais on peut s’entrainer en petit groupe.
M : Comment t’es-tu senti pendant ce confinement ?
J : La compétition m’a honnêtement manqué. C’est quelque chose que j’aime faire, c’est dans mon sang.
M :Tu dois être heureux de venir à Monaco en août dans ce cas ?
J : Absolument. Lorsque j’ai appris que Monaco organisait un 5000m, j’ai vraiment très enthousiaste. Une super sensation.
M : Quel est ton meilleur souvenir ici ?
J : Mon meilleur souvenir à Monaco est naturellement le record du Monde. C’était génial pour moi de courir sur le circuit de Formule 1. J’en ai vraiment profité. Le record du monde est l’accomplissement d’une vie, tout le monde n’en est pas capable.
M : Combien de temps restes-tu au Ouganda ? Quel est le programme des prochaines semaines ?
J : Le plan est de rester m’entrainer ici jusqu’à ce que les compétitions reprennent.
M : Comment le coronavirus a changé les objectifs que tu avais cette année ?
J : Chaque athlète professionnel a des objectifs. Avec tout ce qui se passe avec le coronavirus, il faut réussir à l’accepter, et trouver les solutions pour rendre la vie intéressante. C’est pour ça que je suis concentré sur la volonté de courir à nouveau.
M : Qu’as-tu fait pendant cette période hormis l’entrainement ?
J : J’ai fait un peu de jardinage chez mes grands-parents. Mais principalement, j’ai travaillé dans mon école locale. C’est une école primaire, and j’ai travaillé sur quelques rénovations là-bas, comme en peignant les murs.
M : En parlant d’école, tu as étudié les langues et la littérature à l’université.
J : Exact.
M : Raconte-moi cette expérience.
J : Avant de pouvoir gagner ma vie grâce au sport, j’ai commencé un bachelor en Littérature et Langues à Kampala. Je voulais le terminer mais j’ai dû arrêter à cause de ma carrière professionnelle d’athlète. Mais j’espère bien le finir à l’avenir.
M : Tu es employé par la Police Nationale Ougandaise ? Comment marche ce programme ?
J : Dans les forces de Police Ougandaises, tu as des personnes différentes avec des talents différents. Les footballeurs, des gens talentueux dans la musique, ou des gens comme moi, doués pour courir. Ici, nous essayons de se servir du sport pour rassembler les gens. Je crois que le sport peut réduire la criminalité.
Dans d’autres pays, la plupart des gens voient la police comme des ennemis. On ne ressent pas ça ici. Quand les gens voient des sportifs comme nous, ils sentent qu’ils ne sont pas différents, nous sommes des gens humbles comme eux.
M : Quelles ont été tes premières inspirations pour devenir un champion ? Et quand as-tu réalisé que tu pouvais réellement en devenir un ?
J : Ça remonte à 2012, pendant ma dernière année au lycée. Stephen [Kiprotich] avait remporté la médaille d’or aux Jeux Olympiques de Londres. Le voir gagner l’or a réveillé mon rêve de devenir un champion aussi. J’ai toujours voulu être un grand champion mais mes parents voulaient que j’aie une autre carrière professionnelle, dans un domaine différent. Quand Stephen a gagné, je me suis dit que je devais suivre ma tête et non ce que mes parents voulaient que je fasse.
M : Tes parents t’ont-ils soutenu depuis ?
Absolument. [rires] Ils me soutiennent en effet.
M : Quel est ton prochain défi ?
J : Je veux découvrir les limites, mes limites. Si tu crois en quelque chose, tout est possible. Battre un record du monde fut extrêmement difficile, mais lorsque tu connais la bonne méthode, alors cela devient plus facile. Alors, le prochain défi est de chasser un ou deux records du Monde de plus. Je serais la personne la plus heureuse du Monde.
Je veux aussi devenir champion Olympique, je suivrais ainsi les pas de ma plus grande inspiration, Stephen Kiprotich.
Matthieu FORTIN est un contributeur pour le site du Meeting Herculis EBS.